Un crime colonial
17 Octobre 1961
À l'appel du FLN, 20.000 Français Musulmans d'Algérie manifestent dans Paris. Ils protestent contre l'instauration du couvre-feu en place depuis le 5 Octobre, imposé aux Algériens. En quelques heures seulement, 5000 manifestants sont interpellés. Ces arrestations sont orchestrées par le préfet de police, Maurice Papon. S'ensuit de très violentes exactions. C'est la plus violente répression d'une manifestation, en Europe, depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Ce rassemblement avait pour but de défendre l'indépendance de l'Algérie
5 Octobre 1961. Papon conseille aux travailleurs algériens de ne pas circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue, de 20h30 à 5h30. Dans le but de dénoncer ces mesures discriminantes, la frange française du FLN décide d'organiser des événements contestataires sur trois jours consécutifs. Le 17 Octobre pour braver le couvre-feu. Le 18 Octobre, ils appellent à une grève des commerçants. Enfin, le 19 Octobre, ils prévoient une manifestation des femmes et enfants algériens.
De Gaulle utilise une expression profondément raciste pour qualifier les algériens vivant en Métropole "masse étrangère". Au début des années 60, il y a entre 300 000 et 400 000 algériens en France, 90% d'entre eux sont des hommes, des travailleurs journaliers, ils vivent dans une grande précarité, relégués au large de l'espace urbain. Les autorités les traitent comme des pestiférés, ils sont ignorés par la grande partie de la société. Le 17 Octobre, ils sortent de l'ombre, ils veulent se rendre visibles.
1830. La France colonise l'Algérie. Le peuple algérien est dépourvu de nationalité.
1865. Le droit français évolue et ils deviennent, aux yeux de la loi, français. Néanmoins, ils ne sont pas considérés citoyens français, ils ne dépendent pas du droit civil mais du droit dit musulman. Ils sont identifiés comme Français Musulmans d'Algérie.
1954. Début de la guerre d'Algérie. L'indépendance de l'Algérie est une chimère pour une grande partie de la classe politique française.
1958. De Gaulle accède au pouvoir. Il se prononce rapidement pour l'auto détermination de l'Algérie. Désormais, l'indépendance algérienne semble inéluctable, les accords restent à déterminer.
1960. Négociations entre la France et l'Algérie à Melun. Le gouvernement français s'oppose à la totale indépendance de l'état algérien et ne veulent pas laisser l'Algérie entre les mains du FLN. De Gaulle veut affaiblir le FLN. Au sein du FLN des tensions se font ressentir, certains membres ne veulent pas exporter le conflit en métropole, d'autres considèrent qu'il faut prendre les armes et que la guerre d'indépendance doit se mener en France, également. Le FLN mène en France des actions violentes qui marquent les esprits. Ils ciblent principalement les forces de l'ordre et tuent une dizaine de policiers entre Septembre et Octobre 1960.
"Pour un coup reçu, nous en donnerons 10. Tirez les premiers, vous serez couverts." Voilà les mots de Papon aux policiers français, avant les manifestations d'Octobre 1961. La préfecture de police de Paris incite les flics à utiliser la violence, alors que la foule est pacifique. Lors du 17 Octobre 1961, plus de 11 000 manifestants algériens sont arrêtés par la police française, en seulement quelques heures, ce qui représente plus de la moitié du cortège. Les algériens interpellés ne résistent pas. Aucun policier ne sera blessé. Les premiers coups de feu retentissent sur le pont de Neuilly, deux algériens tués. Sur les grands boulevards, les manifestants sont pris en chasse par les forces de l'ordre, les charges des flics sont d'une telle violence que des passants trouvent la mort.
À partir de 22 heures, les flics intensifient les coups de feu. À concorde, les manifestants se réfugient dans le métro, espérant être épargnés mais ils se font tabassés par les flics les ayant suivis. Sur le boulevard Saint-Michel, des tirs incessants se font entendre et les algériens sont victimes d'une véritable chasse à l'homme. De Gaulle n'apparaît pas ému le moins du monde, au contraire.
Le lendemain et les jours suivants ce terrible crime colonial, des corps sont repêchés dans la Seine. Certains cadavres sont en état de décomposition avancée.
Le massacre ne s'arrête pas là. Derrière les murs du centre d'identification de Vincennes, convoqués pour un simple contrôle d'identité, les manifestants sont tabassés et victimes d'exaction. Certains sont directement abattus, comme Amar Malek. Le palais des sports à Paris a également été réquisitionné par le préfet Papon et a connu son lot de massacres. La nuit du 17 Octobre 1961, plus de 6000 manifestants algériens sont conduit au Palais des sports, via des cars de police et des bus de la RATP réquisitionnés par la police de Papon. Durant plusieurs jours, ces déportés vont y connaître l'horreur, bastonnades, humiliations, exactions... Pour bien montrer ce qui se passe dans ces camps de l'abject, les policiers doivent se réapprovisionner en matraques tant ils en ont brisé en rouant de coups leurs prisonniers.
6600 détenus au Palais des Sports, 2800 au stade de Coubertin, et près de 3000 dans tous les lieux réquisitionnés par le préfet Papon, soit un total de plus de 12 000 algériens arrêtés. Ils seront fichés, l'objet de cette rafle d'algériens est d'expulser des algériens en direction de l'Algérie, ce sont les ordres des autorités. Peu d'entre eux seront finalement expulsés, les autorités finiront par y renoncer, en raison d'un coût de cette opération trop important.
Papon a obtenu son poste de préfet de Paris en Mars 1958, il accède à ses fonctions quelques mois avant l'élection de De Gaulle. En 1942, le même Papon était préfet de Bordeaux et a orchestré la déportation de milliers de Juifs dans les camps nazis. Entre 1954 et 1955, au Maroc, puis en Algérie, entre 1956 et 1958, c'est initié au maintien de l'ordre colonial. Papon avait été nommé, en 1958, Préfet de police dans le but de discipliner la police. La police française connaît beaucoup de cas d'insubordination et bon nombre de ses agents sont proches de l'OAS(Organisation de l'Armée Secrète), mouvance d'extrême droite, soutenant l'Algérie Française et commettant des atrocités, dont des attentats sur le sol algérien, l'État français considère l'OAS comme groupuscule terroriste. En Septembre 1961, De Gaulle, lui-même, échappe à un attentat commandité par l'OAS.
Le crime colonial perpétré par l'État français fait la Une de la presse internationale comme le New-York Times,
Le FLN perd sur le terrain militaire mais réussi à internationaliser le combat de l'indépendance algérienne.
https://www.youtube.com/watch?v=aBKHcLMTISo
Commentaires
Enregistrer un commentaire