Révolution irlandaise (1916-1919) et guerre d'indépendance (1919-1921)
Au début du XXème siècle, aux quatre coins du globe, des peuples colonisés se révoltent. Ils exigent leur liberté, le droit à disposer d'eux mêmes, leur détermination est salvatrice. Le nationalisme monte dans tous ces territoires. Les empires coloniaux commencent à s'ébranler. L'information circule dans le monde plus aisément depuis l'émergence de la révolution industrielle, les irlandais sont informés des révoltes anti coloniales. Un révolutionnaire irlandais crée le syndicat des travailleurs et un marxiste, James Connolly, proche déclare que la cause des travailleurs est la cause de l'Irlande. Des associations féministes se mêlent également à la lutte, elles exigent le droit de vote. Les nationalistes et indépendantistes irlandais les plus radicaux veulent revitaliser la culture irlandaise affaiblit par la domination britannique. En 1909, la ligue gaélique voit le jour pour prôner cette culture irlandaise, parmi les membres, il y a des leaders de la future révolution et de prochains présidents irlandais.
À partir des années 1870, des députés irlandais siégeant au parlement britannique soutiennent le Home Rule. Le but est la création d'un parlement irlandais à Dublin pour gérer les affaires internes, néanmoins l'Irlande resterait sous tutelle britanniques. Les nationalistes radicaux ne se satisfassent pas de cette option. En 1910, les élus irlandais obtiennent la majorité au parlement de Londres. Le gouvernement britannique n'a pas le choix et consent au Home Rule. Au nord de l'Irlande, des contestataires font connaître leur mécontentement et opposition au Home Rule, ils réclament de rester sous tutelle britannique. En 1913, dans la région d'Ulster, une milice politique armée voit le jour pour contrer le projet du Home Rule. Face à l'inertie de Londres, les nationalistes irlandais crée un groupe paramilitaire pour se défendre contre la milice du Nord. L'irlande est au bord d'une guerre civile.
En 1914, la première guerre mondiale éclate. Le Royaume-Uni entre en guerre contre l'Allemagne. Les irlandais intègrent l'armée britannique, ceux prônant l'indépendance de l'Irlande et ceux défendant l'Union se battent côte à côte dans la même armée. Avril 1916, alors que les pertes sont lourdes dans les camps de tous les belligérants, la situation s'envenime en Irlande. Les républicains irlandais ont récolté une belle somme émanant de la diaspora irlandaise aux États-Unis et fondent un groupe armé. À Pâques, plusieurs organisations pour l'indépendance de l'Irlande prennent le contrôle de bâtiments clés à Dublin. le révolutionnaire Patrick Pearse déclare l'indépendance de l'Irlande et proclame la République Irlandaise. Les initiateurs de cette action révolutionnaire savent que ça n'aboutira pas, ils n'ont rassemblé que 2 000 hommes. Néanmoins, la semaine de Pâques 1916 restera dans les annales de l'Histoire et fera naître un sentiment révolutionnaire, indépendantiste dans une frange importante de la population. L'armée britannique est déployée à Dublin pour neutraliser l'action menée par Pearse. Elle réprime le soulèvement dans le sang. À la fin de la semaine, 500 morts sont à déplorés dont la majorité sont des civils. Patrick Pearse dépose les armes le 29 avril pour éviter un nouveau désastre humain. Les insurgés sont forcés de défiler dans Dublin et sont violemment conspués. Les leaders de la révolte sont jugés par un tribunal militaire et envoyés au trou. Plusieurs meneurs dont Patrick Pearse, Tom Clarke sont fusillés, le 3 Mai. Ils seront 16 au total à être fusillés, beaucoup sont adeptes du socialisme. Le premier ministre britannique interrompt les exécutions. Le but de ces condamnations à mort est d'éteindre toute flamme de rébellion au sein des Irlandais, il aura l'effet inverse. Les irlandais pas très enthousiasmés par le soulèvement vont finalement se joindre à cette animosité contre la couronne. Pour mater la tentative de soulèvement de la semaine de Pâques, 3000 irlandais sont arrêtés, beaucoup n'ont pas participé au mouvement, ils sont incarcérés en Angleterre, loin de chez eux. Le sentiment anti Grande-Bretagne va s'accentuer en Irlande. Dans les camps, les prisonniers irlandais échangent, parlent de leur avenir, élaborent la mise en place d'un soulèvement, d'une révolution, envisagent la fondation de leur propre État. En décembre 1916, le gouvernement britannique, sous la pression des nationalistes irlandais, relâchent certains détenus irlandais, les autres seront amnistiés six mois plus tard. À leur retour, ils sont en accueillis en héros par le peuple.
1917. Des élections législatives partielles sont organisées pour des postes au parlement britannique. Les nationalistes irlandais cherchent à frapper fort, ils parcourent le pays à la recherche de soutien. La ligue gaélique se joint à eux. Tout ce beau monde se réunit derrière la bannière Sinn Féin. Ils prônent un régime démocratique pour l'Irlande, que les citoyens décident de leur propre sort. Ils veulent sortir du Royaume-Uni. Les quatre postes sont remportés par les candidats du Sinn Féin. La Grande-Bretagne est écœurée par ce résultat, elle réagit en censurant la presse nationaliste et banni le drapeau irlandais. Malgré la politique répressive des britanniques, les rangs des volontaires irlandais se remplissent fortement. Néanmoins, à ce moment-là, seuls les nationalistes les plus radicaux sont favorables à un nouveau soulèvement.
Octobre 1917. Eamon de Valera est élu à la tête du parti Sinn Féin. Il est de nationalité irlandaise mais est né aux États-Unis. Les trois premières élections partielles avec de Valera à la tête du Sinn Féin sont des défaites cinglantes. Les britanniques, sûr de leurs forces, instaurent la conscription.
Avril 1918. Alors que jusqu'à présent les irlandais envoyés sur le front, sur le continent, étaient des volontaires. Depuis que la conscription a été votée, le gouvernement britannique envoie des irlandais à la guerre. Ceci va créer un vent de révolte en Irlande. Des mobilisations, grèves, messes contestataires sont organisées dans toute l'Irlande, le Sinn Féin connaît un afflux de militants. Les autorités britanniques réagissent et font arrêter les têtes pensantes du mouvement contestataire, en tête de liste Eamon de Valera. Les meetings politiques sont interdits. Après 4 mois de heurts, Londres fait machine arrière, les irlandais sont exclus de la conscription militaire. Le 11 Novembre, la première guerre mondiale s'achève. Dans la foulée, des élections législatives sont organisées en Irlande, les femmes de + de 30 ans et propriétaires ainsi que les hommes de + 21 ans sont appelés aux urnes, c'est un triplement du nombre d'électeurs. Au Nord, les Unionistes l'emportent largement. Ils sont opposés à un État irlandais indépendant et souhaitent le maintien dans le Royaume-Uni. Dans le reste du pays, le Sinn Féin signe une victoire historique avec 73 sièges. Pourtant, la moitié des élus du parti nationaliste sont emprisonnés. Néanmoins, cette victoire électorale marque un tournant, les irlandais tournent le dos au Home Rule et veulent leur indépendance.
Même si les membres du Sinn Féin s'opposent à un conflit armé avec la couronne britannique, le fait que cette dernière refuse de reconnaître l'indépendance irlandaise semble précipiter la discorde vers la guerre. Durant le conflit, l'armée républicaine irlandaise verra 100000 volontaires venir garnir ses rangs. Parmi eux, seuls 3000 sont des combattants armés, les autres mènent d'autres actions comme du renseignement.
En Janvier 1919, les députés du Sinn Fein refusent de siéger à Londres et se retrouvent à Dublin. Comme Pearse en 1916, ils proclament la République d'Irlande et préparent la création de leur État indépendant.
Après s'être évadé de prison, Eamon de Valera se rend aux USA pour convaincre la diaspora irlandaise, nombreuse depuis la famine, de faire pression sur Wilson, président des États-Unis, pour soutenir l'indépendance irlandaise. La couronne britannique obtient de Wilson qu'il aille dans son sens, il ne reconnaît pas l'indépendance irlandaise. L'IRA (armée républicaine irlandaise) commet des actions violentes contre la police britannique déployée en Irlande. Des groupes politiques modérés appellent à cesser ces actions et à ostraciser les flics et leurs enfants afin de les faire craquer. Durant l'été 1919, l'IRA installe son QG à Dublin. Face à de nouvelles actions violentes, le premier ministre britannique agit en interdisant le SinnFéin, l'IRA et le parlement irlandais.
Janvier 1920. L'IRA, pourtant interdite, mène une action militaire contre une base militaire royaliste au sud de l'Irlande. Entre 1919 et 1921, 700 casernes de la police royale ferment leurs portes en Irlande, suite à de nombreuses démissions d'officiers craignant pour leur vie. Winston Churchill, à l'époque secrétaire général à la guerre, recrute des soldats démobilisés après la première guerre mondiale et fonde une force de police auxiliaire chargé de réprimer les actions de l'IRA, il s'agit des black and tans. Churchill les autorise à torturer et les encourage à tuer le plus d'adversaires possible.
Avril 1920. Les indépendantistes irlandais célèbrent les quatre ans du soulèvement de Pâques 1916. Une cinquantaine de prisonniers irlandais entament une grève de la faim et réclament leur libération. Au bout de plusieurs semaines, ils sont libérés. Les dirigeants irlandais ne reconnaissent plus les tribunaux britanniques et créent leur propre juridiction. Les citoyens irlandais ne paient plus leurs impôts à la couronne et préfèrent soutenir financièrement les mouvements républicains irlandais. Les cheminots irlandais entament une grève, ce qui mettra en péril le déplacement des troupes britanniques. Voyant que l'IRA s'est implantée dans toute l'Irlande, le Royaume-Uni réagit. Churchill envoie un général qui donne l'ordre à ses soldats qu'à la rencontre de chaque irlandais "Ordonnez leur de levez les mains, s'ils refusent, ouvrez le feu." L'armée royaliste incendie également des lieux essentiels dans les campagnes irlandaises, la division s'avère d'autant plus grande entre la population irlandaise et Londres.
Août 1920. Le parlement britannique adopte une loi sur la restauration de l'ordre en Irlande, des centaines de membres de l'IRA sont incarcérés. Par la suite, l'IRA crée de petites divisions d'une dizaine d'hommes dont le but est de mener des actions éclaires. Pour se cacher, ils peuvent compter sur le soutien des civils ainsi que d'autres groupes républicains irlandais. Le maire de Cork, Terence MacSwiney, est arrêté pour sédition et incarcéré à Londres, il est condamné à deux ans de travaux d'intérêts généraux. Le maire entame une grève de la faim, la presse internationale se saisit de l'affaire. De nombreux gouvernements étrangers, ainsi que le pape, appelle à sa libération. Londres refuse. À Lisburn, des membres de l'IRA assassine un policier royaliste haut gradé, en représailles, des fervents unionistes nord irlandais incendient des usines aux mains de patrons catholiques. Les royalistes prennent à parti, à Belfast, des ouvriers catholiques. L'IRA répond en tuant des royalistes. Après trois semaines de combats et une vingtaine de morts, le gouvernement ordonne un couvre feu.
Septembre 1920. Dans un bar, près de Dublin, l'IRA tue un policier royaliste. En réponse à cet acte, le gouvernement britannique envoie plus d'une centaine de membres des black and tans, ils organisent une expédition punitive. Ils tuent des dizaines de civils et deux membres de l'IRA, ils incendient des maisons. Durant des mois, des actions de ce genre seront commises par les black and tans.
Octobre 1920. Dublin vit sous couvre feu depuis de nombreux mois. Les commerçants irlandais refusent de servir les membres de la police royaliste et les soldats de la couronne. Avec 9000 hommes déployés, les britanniques bouclent des quartiers entiers et perquisitionnent les commerces et habitations. En Irlande, c'est un total de 55000 soldats britanniques qui sont déployés. Alors que le gouvernement pense avoir neutraliser les ardeurs de l'IRA, le monde a les yeux fixés sur le sort du maire de Cork. Il décède après 74 jours de grève de la faim. Sa mort crée un tollé international. Le premier ministre britannique propose une trêve, l'IRA refuse, doutant de la sincérité de cette offre. Pour briser la sédition irlandaise, les britanniques mettent sur pied un groupe d'officiers de sécurité nommé "Gang du Caire". Michael Collins, leader de la révolution, l'apprend et les fait assassiner.
Novembre 1920. L'opération commanditée par Collins fait quinze morts. Le même jour, un match sportif est programmé à Dublin. Les black and tans sont envoyés sur place pour fouiller les spectateurs. Les forces britanniques ouvrent le feu, un mouvement de panique se crée. Cette attaque vengeresse coûte la vie à 14 personnes dont trois enfants. La presse internationale se saisit de ce dimanche sanglant. L'opinion publique britannique est extrêmement choqué, d'avantage par la tuerie de civils perpétrée par les black and tans. Churchill, secrétaire général à la guerre, maintient le cap. Un autre drame survient peu de temps après, des hommes des black and tans arrêtent et tuent deux frères, qu'ils suspectent d'être membre de l'IRA. Aucun fait n'apporte d'éléments concrets aux accusations. Un média irlandais clandestin se saisit de l'affaire et grâce à la diaspora irlandaise la diffuse à l'internationale.
Décembre 1920. Le gouvernement britannique instaure la loi martiale dans la province du Munster, au sud de l'Irlande. Lors d'une nuit de décembre, des black and tans débarquent à Cork. Ils incendient et pillent des quartiers entiers de la ville. Conséquence, 2000 personnes se retrouvent sans emploi. Au Nord, la situation est différente, la majorité des citoyens de la province d'Ullster veulent rester au sein du Royaume Uni. La Grande-Bretagne envisage alors la mise en place de deux parlements, un pour le nord et un au sud. Le 23 décembre, la loi sur le gouvernement irlandais est promulguée. Il s'agit d'une solution britannique et unioniste à la question irlandaise. Les nationalistes irlandais voulant l'indépendance de l'Irlande n'ont pas été consultés. Ce texte de loi prévoit la création d'un nouvel État, il s'agit de l'Irlande du Nord, composée de 6 des 9 comtés de la province du Ullster. Après 18 mois passés aux États-Unis Eamon de Valera rentre en Irlande, il n'a pas réussi l'administration US de reconnaître l'État indépendant d'Irlande. Aucun accord pacifique n'étant trouvé, le conflit s'intensifie. Une commission d'enquête de Washington est envoyée sur place et constate les dégâts de la guerre commis l'armée britannique. Malgré cela, la couronne britannique continue d'intensifier ses attaques en Irlande. Plus le conflit perdure, plus la haine des irlandais envers Londres s'amplifie.
Mai 1921. L'IRA est en manque d'armes et de munitions. Michael Collins tente de s'en procurer sur le vieux continent mais le convoi reste bloqué. Après quelques semaines, les républicains de l'IRA incendient le poste des douanes, symbole de l'oppression britannique. Des hommes d'une brigade de la police royale se rendent sur place et une fusillade, les membres de l'IRA, mal équipés, doivent se rendre. Des élections législatives sont organisées en Irlande, le Sinn Féin remporte la quasi totalité des sièges. Le gouvernement britannique commence à comprendre qu'ils ne pourront parvenir à imposer leur propre gouvernement aux Irlandais.
Juillet 1921. Les deux camps s'accordent pour une trêve. C'est la fin de la guerre d'indépendance irlandaise. Le conflit entre les forces Républicaines Irlandaises et le Royaume-Uni aura coûté la vie à 2000 personnes. Les négociations traitant de l'indépendance irlandaises sont entamées. La délégation irlandaise est dirigée par Michael Collins et Arthur Griffith. Face à eux, pour défendre les intérêts anglais, on retrouve David Lloyd George et Winston Churchill. Le Sinn Féin, côté irlandais, réclame une République d'Irlande. Les britanniques veulent le Home Rule, un parlement à Dublin supervisé par les britanniques, et veulent conserver l'Irlande du Nord dans le Royaume-Uni.
Décembre 1921. Les britanniques établissent une dernière offre que Collins accepte. Elle est votée par le parlement irlandais. L'Irlande ne devient pas encore une République mais elle en a les bases et obtient quelques libertés importantes. Malgré tout, les britanniques conservent le contrôle de certains ports, importants pour leurs marchandises.
Janvier 1922. Les troupes britanniques amorcent leur retrait d'Irlande. Le château de Dublin est remis au premier gouvernement provisoire d'Irlande. Le mouvement indépendantiste est rapidement divisé par le traité fondant l'État libre d'Irlande. Eamon de Valera fait partie des contestataires et ne voit pas ce traité comme une victoire. Ce qui les dérange, c'est que l'Irlande n'est pas encore une République et que beaucoup de combattants irlandais ont donné leur vie pour ce combat. De plus, l'Irlande doit encore jurer fidélité au roi d'Angleterre, pour beaucoup c'est trop.
Juin 1922. Une guerre civile éclate en Irlande entre les partisans et les opposants du traité de l'État libre. Lors de cette guerre civile, Michael Collins, président provisoire du gouvernement irlandais, est exécuté par des membres de l'IRA, dont il a fait parti et même dirigé. Cette guerre durera 11 mois et fera 1500 morts. Les opposants s'avouent vaincus et déposent leurs armes.
L'Irlande change de constitution en 1937, il n'est plus fait mention soumission à la couronne britannique et accorde aux irlandais sa souveraineté plein et entière sur 26 comptés. En 1949, l'Irlande quitte le Commonwealth et se proclame République de manière officielle. En 1955, l'Irlande intègre l'ONU comme État souverain.
Lien Youtube du documentaire Arte: https://www.youtube.com/watch?v=lfCS2cvbAlI
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